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Revue 303
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Deux fois reine, Aliénor a goûté au pouvoir suprême. Non pas de façon officelle, mais informelle. De son temps, si l'épouse ne prend pas publiquement les décisions, elle peut orienter la politique de son mari en fonction de son ascendant sur lui. Aliénor exerce une influence certaine sur Louis VII jusqu'à ce qu'éclate, en Terre Sainte, une forte divergence sur l'orientation à donner à la croisade. Elle prend alors contre lui le parti de son oncle, Raymond, prince d'Antioche, mais elle est aussi l'héritière du vaste duché d'Aquitaine s'étendant des Pyrénées à la Loire. En théorie, elle le gouverne à sa guise, même si le caractère autoritaire de son second mari, Henri II d'Angleterre, l'en a souvent empêché. Pour le contraindre à céder, elle fomente, en 1173, la vaste révolte de ses enfants contre lui. Son échec lui vaut sa résidence surveillée jusqu'à son veuvage. Son mari envisage même de la répudier. Elle se retire alors à Fontevraud, où sa tante Mathilde d'Anjou a été abbesse.
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La vie de Robert d'Arbrissel nous est principalement connue grâce à deux biographies écrites après sa mort et avant 1119 par Baudri, archevêque de Dol, et André, prieur de Fontevraud. Marbode, évêque de Rennes, et Geoffroy, abbé de Vendôme, lui adressent deux lettres de reproche, en 1098-1100 et 1106. Robert lui-même écrit une lettre de direction à Ermengarde, comtesse de Bretagne, vers 1109, et rédige l'essentiel des statuts de Fontevraud. Entre critiques acerbes de Marbode et Geoffroy, et célébration d'une sainte vie par Baudri et André, la mémoire de Robert est placée sous le signe de la contradiction.
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Le lien entre l'univers pénitentiaire de Fontevraud et le geste littéraire de Jean Genet est étroit. Comment ne pas évoquer l'oeuvre de l'écrivain pour présenter Fontevraud dans son état d'abbaye-prison durant plus de 150 ans ? Si Le Miracle de la rose reste un univers imaginaire, la centrale pénitentiaire de Fontevraud est réalité.
L'abbaye avec ses cloîtres, ses cours, ses allées, ses celliers a collé aux exigences de l'enfermement carcéral. Les traces de l'organisation pénitentiaire qui concernait des milliers de détenus - hommes, femmes et enfants - et mobilisait toute une communauté de familles de surveillants qui habitaient hors les murs ont été effacées et gommées.
Mais il est possible ici de dessiner les contours de cette pièce du puzzle de l'histoire de l'abbaye pour conduire le visiteur, pas à pas, dans la découverte du rôle et de la place de la centrale dans le paysage pénitentiaire français. En levant le voile, le visiteur découvre aussi un « patrimoine noir » qui aurait sans doute disparu sans son rôle de prison. C'est à cette autre rencontre avec l'abbaye dans son corset de fer que ce double portrait convie.